Embaucher un intermittent du spectacle étranger (autorisation, paie, taxes, cotisations)
Vous souhaitez embaucher un artiste ou un technicien étranger en intermittence du spectacle, mais vous ne savez pas quelles démarches faire (autorisation de travail, retenue à la source, cotisations…) ?
Cette fiche vous donne une méthode simple pour identifier le bon cadre et contacter les bons interlocuteurs.
⚠️ Important : les règles varient selon la nationalité, la durée du contrat, et la situation du salarié (non-résident fiscal, détachement, etc.). En cas de doute, faites valider par votre expert-comptable / conseil social.
1) Première étape : identifier le cas (UE/EEE/Suisse ou pays tiers)
Salarié ressortissant UE / EEE / Suisse
Les ressortissants de l’UE/EEE/Suisse bénéficient de la libre circulation : en pratique, vous n’avez pas de “dossier visa” à monter pour l’entrée sur le territoire, mais vous devez respecter toutes les formalités d’embauche françaises (contrat, DPAE, paie, DSN, etc.).
Salarié ressortissant d’un pays tiers (hors UE/EEE/Suisse)
C’est ici que l’on distingue séjour (visa/titre) et travail (autorisation).
Autorisation de travail : principe
Une autorisation de travail est en principe obligatoire pour un étranger qui vient travailler en France.
Exception “≤ 3 mois” dans certains secteurs (dont spectacle)
Un décret liste des secteurs pour lesquels, pour une activité salariée d’une durée ≤ 3 mois, l’autorisation de travail peut être dispensée (notamment production/diffusion audiovisuelle, cinéma, spectacle, édition phonographique, lorsque la personne est artiste du spectacle ou technicien rattaché directement à la production).
Point de vigilance : même en cas de dispense d’autorisation de travail, il peut rester des exigences d’entrée/séjour (visa selon le pays, durée, justificatifs).
2) Autorisation de travail & titres : à qui s’adresser ?
Cas où une démarche est requise (souvent > 3 mois, ou hors champ de dispense)
- Le cadre “Passeport Talent – Profession artistique et culturelle” existe, et un formulaire dédié peut être demandé dans le dossier.
- Pour la partie justificatifs contrat (selon cas), le Cerfa 15617*01 est référencé par l’administration.
- dépôt/échange avec l’administration via les parcours officiels (préfecture/consulat selon séjour),
- ou démarches spécifiques “autorisation de travail” lorsque requises.
- pour les salariés détachés ressortissants d’États tiers, les autorisations de travail le cas échéant (se reporter à l'étude “Autorisations de travail et de séjour ” pour plus d'informations) ;
- Le cas échéant, le document attestant d'un examen médical dans le pays d'origine équivalent à celui prévu à l'article R. 1262-13 ;
- Lorsque la durée du détachement est supérieure ou égale à un mois, les bulletins de paie de chaque salarié détaché ou tout document équivalent attestant de la rémunération. Il doit comporter les mentions suivantes : rémunération brute, périodes et horaires de travail (avec distinction des heures au taux normal et des heures au taux majoré), congés et jours fériés, conditions d'assujettissement à la caisse des congés payés et congés intempéries , intitulé de la convention collective applicable s'il y a lieu) ;
- Lorsque la durée du détachement est inférieure à un mois, tout document apportant la preuve du respect de la rémunération minimale ;
- Tout document attestant du paiement effectif de la rémunération (copie du chèque délivré au salarié, remise d'un reçu signé par le salarié, etc.) ;
- Un relevé d'heures indiquant le début, la fin et la durée du temps de travail journalier de chaque salarié.
Artistes indépendant dans un pays de l’UE ou de l’EEE. La présomption des artistes du spectacle prévue à l'article L7121-3 du Code du travail ( ) ne s'applique pas aux artistes reconnus comme prestataires de services établis dans un État de l'UEou de l'EFE, dans lequel ils fournissent habituellement des services analogues et qui viennent exercer leur activité en France, par la voie de la prestation de services, à titre temporaire et indépendant (art. L7121-5 du Code du travail ).
Toutefois, l'entrepreneur de spectacles qui fait appel à des artistes prestataires de services dans l'UE ou l'EEE doit rester vigilant : la Cour de cassation a jugé que pour ne pas salarier ces artistes, l'organisateur devait rapporter la preuve qu'ils avaient bien la qualité de travailleurs indépendants dans leur État membre (Cass, civ. 24 avr. 2012. n°11-14505. Inédit).
A défaut de pouvoir démontrer que les artistes sont des travailleurs indépendants, l'entrepreneur de spectacle est considéré comme étant leur employeur. La situation de travailleur indépendant peut être rapportée par le biais du formulaire A1.
Artistes indépendants hors UE et EEE. La présomption de salariat s'applique en revanche aux artistes établis en dehors de l’UE et l’EEE. Ainsi, un artiste qui exerce son activité de manière indépendante dans son pays d’origine devra être salarié pour toute prestation artistique exercée en France.
Les ressortissants de l’UE bénéficient du principe de « libre circulation » et à ce titre, ils n’ont pas à fournir de documents spécifiques lors de leur embauche.
Ressortissant d’un pays tiers à l’UE : Pour un artiste ou un technicien du spectacle étranger, dont la durée du contrat de travail est inférieure à 3 mois, il n’est pas nécessaire de demander une Autorisation Provisoire de Travail (APT).
3) Paie & fiscalité : retenir l’impôt à la source si le salarié est non-résident fiscal
Lorsqu’un intermittent est non-résident fiscal, une retenue à la source peut s’appliquer sur ses rémunérations de source française.
A) Technicien (retenue “non-résidents” – barème)
La retenue à la source sur les salaires des non-résidents (article 182 A du CGI) s’applique par tranches. Le tarif est actualisé chaque année ; voici le barème 2025 publié par l’administration :
Base de calcul : salaire net imposable, après abattement forfaitaire de 10%.
| Taux | Tranche mensuelle 2025 (après abattement) |
|---|---|
| 0% | < 1 427 € |
| 12% | de 1 427 € à 4 139 € |
| 20% | > 4 139 € |
Le salarié détaché continue d’être rémunéré par son employeur d’origine. Ce dernier doit respecter le noyau dur des règles de droit du travail applicables en France (rémunération minimale et temps de travail notamment). Les bulletins de paie appliqueront donc la rémunération minimale française mais les cotisations sociales du pays d’origine.
Etablir un bulletinn de paye d'un salarié détaché par l'entreprise francaise peut être considéré que les conditions de détachement ne sont pas respectées et dans ce cas la loi Francaise s'applique.
B) Artiste (retenue spécifique “prestations artistiques”)
Pour les sommes payées en contrepartie de prestations artistiques fournies ou utilisées en France, la retenue à la source prévue par l’article 182 A bis du CGI est en principe au taux de 15%.
Base de calcul : montant brut diminué d’un abattement de 10% (frais professionnels).
4) Cotisations sociales : principe France… sauf détachement
Exception : détachement / coordination internationale
En cas de détachement, le salarié peut rester affilié au régime de sécurité sociale de son pays d’origine.Dans l’UE/EEE/Suisse, le document clé est le formulaire A1, qui atteste la législation de sécurité sociale applicable et évite la double affiliation.
Sans preuve valide (ex : A1), l’employeur est généralement tenu d’appliquer le régime français.
Entreprise étrangère sans établissement en France : interlocuteur URSSAF
Si l’employeur est établi à l’étranger et n’a pas d’établissement en France, il existe un dispositif et un service URSSAF dédiés (“Firmes étrangères”) pour gérer affiliation et cotisations.Le Titre firmes étrangères (TFE) est un dispositif du réseau des Urssaf destiné à simplifier les formalités sociales liées à l'emploi de salariés par des entreprises sans établissement en France. Cette offre de service gratuite est gérée par le centre national Titre firmes étrangères.
Un organisateur de spectacles français exploite un spectacle à un producteur étranger, qui salarie les artistes.
Le diffuseur français doit vérifier que le producteur étranger a bien effectué la déclaration préalable au détachement et a bien désigné un représentant de son entreprise en France.
À défaut, il s’expose à une amende administrative.
5) Congés Spectacles : ne pas l’oublier
Dans le spectacle, les congés payés passent par la caisse Congés Spectacles : l’employeur calcule et verse une cotisation liée aux embauches concernées.
Si vous pensez être dans un cas d’exonération (rare) ou d’équivalence, faites valider auprès des organismes compétents (Audiens / Congés Spectacles) avant d’écarter la cotisation.
Par principe de précaution, nous conseillons ma pratique de cette cotisation.
6) DPAE / DSN : quelles infos si le salarié n’a pas de numéro de sécu français ?
Selon les cas, vous pouvez utiliser un numéro technique temporaire (NTT) pour les déclarations, puis régulariser lorsque le NIR définitif est connu.
Checklist rapide (à garder sous la main)
Avant l’embauche
- Nationalité (UE/EEE/Suisse ou pays tiers)
- Durée du contrat (≤ 3 mois ou > 3 mois)
- Statut fiscal (résident / non-résident)
- Détachement : demander A1 ou justificatif équivalent si applicable
- Vérifier la convention fiscale France ↔ pays de résidence
- Contrat (CDD d’usage intermittent )
- DPAE
- Paie conforme
Retenue à la source si non-résident (182 A ou 182 A bis selon cas)
- Déclaration/paiement de la retenue à la source (si due)
- DSN et organismes sociaux
- Congés Spectacles
Pour gagner du temps côté production de paie
Si vous produisez régulièrement des paies d’intermittents (y compris cas internationaux), un outil de paie spécialisé peut vous faire gagner beaucoup de temps sur : bulletins, contrats, DPAE/DSN, justificatifs, et sécurisation des calculs.
Exemple : DV-LOG Interpaye (spécialisé spectacle) est conçu pour gérer la paie des intermittents et les formalités associées.
Registre du personnel de l’entreprise d’accueil
L’entreprise accueillant des travailleurs détachés doit annexer les accusés de réception des déclarations préalables de détachement au registre unique du personnel
Précisions « paye » pour les salariés détachés en France
Le formalisme du bulletin de paye français n’est pas exigé d’un employeur étranger. Toutefois, un « document équivalent » devra comporter les éléments permettant un contrôle des dispositions incontournables du code du travail. Une attention particulière doit être apportée au respect du salaire minimum et du temps de travail.